Transmarcations était une session de travail située à l’intersection des technologies et des géographies, des trajectoires de vie, des corps, des terrains et des déplacements. Elle a eu lieu du 4 au 9 décembre 2017 au Beursschouwburg, un centre artistique multidisciplinaire, situé au cœur de Bruxelles.
La session de travail Transmarcations explorait des méthodes de dessins de cartes d’ici, d’ailleurs et d’autres. Elle invitait des participants provenant de disciplines différentes, à créer des prototypes, des visualisations et des modèles de combinaisons spéculatives autour des corps et des terrains. Les bio-mappeurs, les artistes, les militants du genre et de la migration, les hackers scientifiques, les cartographes, les fouilleurs de données, les auto-quantificateurs ... étaient invités à expérimenter avec des logiciels, des langues, des corps, des navigateurs et d’autres technologies. Transmarcations développait ainsi des pratiques autour de la cartographie, de la diagrammation et des représentations graphiques numériques ; elle créait un espace pour des aspects qui se positionnent au delà des catégories ordinaires, pour les complexités générées par la rencontre des personnes, des terrains et encore d’autres facteurs.
Transmarcations s’intéressait à la complexité qui naît de la rencontre entre la cartographie et les corps en transition. Par corps en transition nous entendions des corps migrants tout comme des corps qui se lancent dans un processus interne de changement, comme les transitions de genre. En observant de près les situations dans lesquelles les corps se trouvent, Transmarcations interrogeait la (non-)pertinence des standards et la présence intrinsèque de codes culturels. Quels outils sont utilisés ? Quels langages, paramètres, conventions ?
Le contexte socio-politique actuel nous rappellait que les mappages et les visualisations de données jouent un rôle important dans le contrôle des personnes et des déplacements. Les analyses de données font ressortir les exceptions comme des éléments suspects. Des formulaires standards médicaux, de migration et autres rendent souvent impossible la représentation nuancée. Les demandeurs d’asile semblent mieux se conformer à des profils stéréotypés pour obtenir le statut de réfugiés. En outre, le contrôle étroit du trafic de données par des services de sécurité (inter)nationaux, couplés à l’extrême portée du contrôle exercé par les géants de l’Internet sur les profils de leurs clients, laisse peu d’espace à des corrélations transversales pouvant élargir l’identification au-delà des notions délimitées de « eux » et de « nous ».
Les expérimentations qui mettent la spéculation, l’insécurité et les frontières au centre sont importantes pour imaginer et générer des alliances situées et non-normatives entre les corps, les trajectoires et les contextes . Au-delà des statistiques et des analyses, les diagrammes, les modèles et les tableaux sont aussi des moyens d’établir de nouvelles orientations, de projeter des désirs hybrides, fantastiques et utopiques sur une réalité physique.
Inspirée des géographies féministes, la session de travail posait la question du point de vue : qui sont les utilisateurs, quelle carte regardent-ils, et à partir de quelle perspective ? Nous marquions un X technologique sur une carte qui est en pleine évolution. Ce X ne représentait pas une destination, il représentait plutôt une logique qui traite des relations de puissance inégales entre les êtres humains ; qui propose des espaces élargis de liberté individuelle avec une géométrie plus riche que celle de l’axe, de la ligne de production, du dynamisme unidirectionnel. Nous situions les corps dans l’espace et le temps, les perturbions et les réorganisions ; nous nous promenions hors des sentiers battus ; nous développions une pratique relationnelle de désorientation, en regardant au-delà de la mise au point vers les liens inattendus entre les espèces, les environnements, les objets.
La session de travail se déroulait du 4 au 9 décembre 2017 au Beursschouwburg dans le centre de Bruxelles.
Au programme :
* Des journées de travail concentrées collectives, des ateliers et des moments d’échange (avec entre autres Pierre Huyghebaert, Pascale Barret, A. Alexander Antonopoulos)
* Des excursions vers des lieux pertinents à Bruxelles (comme p.ex. L’Institut National de Géographie)
* Une installation interactive et évolutive de François Zajegá dans le Grand Hall.
* Une soirée publique avec des conférences au Beurscafé
Avec la collaboration de Molenbeek Formation, De Beursschouwburg
image : Attack of the panoramic jellyfish, Tom Lechner, cc-sa